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Dossier

La moisson protège les ecosystèmes

La moisson est l’aboutissement d’un cycle cultural et végétatif long de cinq à dix mois selon les espèces. Elle dessine le gagne-pain du céréalier et le garde-manger de ses concitoyens. Mais la moisson et son branle-bas de mécaniques présentent des risques pour la faune qui a fait des champs de céréales son habitat naturel. Comment garnir nos assiettes sans faire table rase des parcelles moissonnées et des écosystèmes qui y sont attachés ?


Lièvres, faisans, cailles, perdrix, busards, chevreuils… : nombreuses sont les espèces animales qui trouvent au pied des épis de blé des conditions idéales pour vivre et se reproduire. Mais la nature ne fait pas toujours bien les choses. Le cycle biologique des espèces animales peut ne pas correspondre au cycle des espèces végétales et aux besoins vitaux des Hommes qui les cultivent.

Les opérations de récolte de céréales ne se cantonnent pas au passage de la  moissonneuse-batteuse. Il faut compter aussi avec les allées et venues des bennes évacuant les grains. Le ramassage de la paille, qui fera office de litière pour les animaux en hiver (sinon d’une valorisation en biomasse), fait lui-même intervenir des machines spécifiques (des presses) puis des remorques pour acheminer les bottes constituées jusqu’à l’exploitation. Au final, les risques sont nombreux pour les petits mammifères, oiseaux et insectes auxiliaires.

Le bruit généré par toutes ces machines constitue un avertisseur efficace mais pas suffisant. Les techniques de conduite des chantiers ainsi que des pratiques agricoles idoines contribuent à réduire les impacts de la moisson sur la faune sauvage.

Prendre en compte l’existence et la préservation de la faune sauvage n’est pas forcément dispendieux, ni en temps, ni en moyens. La preuve avec les recommandations suivantes :

  • sensibiliser les conducteurs des moissonneusesbatteuses et autres machines,
  • repérer et marquer préalablement les nids et récolter les oeufs le cas échéant avant de les remettre à une société de chasse,
  • provoquer, juste avant récolte, l’effarouchement des animaux au moyen de cris, de canons à carbure, de chiens,
  • régler la barre de coupe au minimum à 15 cm de hauteur,
  • utiliser une barre d’envol correspondant à la largeur de la barre de coupe ou encore un détecteur infrarouge,
  • adopter un circuit de récolte centrifuge pour ne pas emprisonner la faune au centre de la parcelle et fur et à mesure de l’avancement du chantier,
  • éviter l’intervention de plusieurs machines dans la même parcelle,
  • limiter le plus possible les récoltes de nuit,
  • broyer simultanément la paille non récoltée pour économiser un passage d’engin supplémentaire,
  • presser la paille dans les 48 heures après moisson avant que la faune n’établisse son refuge sous les andains.

Si la faune sauvage établit son habitat dans les écosystèmes temporaires que sont les cultures de céréales, la mise en oeuvre de bonnes pratiques agricoles doit permettre à cette même faune sauvage de trouver d’autres habitats relais.
Les possibilités sont limitées dans les grandes plaines, qui laissent peu de place aux terres incultes, bosquets et autres forêts.
Mais il est possible de jouer sur la mixité entre cultures d’automne et de printemps pour fournir des abris alternatifs lorsqu’une culture atteint le stade de la récolte.
Entre deux cultures à vocation alimentaire, la mise en place temporaire de couverts végétaux peut aussi faire office de relais, entre autres bénéfices (lutte contre l’érosion, fixation des nitrates).
L’insertion de bandes non cultivées (jachère, placettes) ou encore la préservation ou la restauration d’éléments paysagers tels que haies, bandes enherbées, arbres champêtres permettent de corriger les inconvénients liés à la spécialisation de certains territoires.

Avec l’érosion, les risques de pollution diffuse ou accidentelle ou encore la baisse du taux de matière organique, le tassement excessif des sols menace la fertilité des sols. Une menace insidieuse car non perceptible mais souvent
irréversible, et pouvant contribuer à la baisse sinon au plafonnement des rendements.

La pression au sol exercée par des engins (moissonneusesbatteuses et bennes) de plusieurs dizaines de tonnes est très importante. Sur sol sec, les impacts sont limités mais dès que le sol est humide, ce qui peut se produire pour les récoltes d’automne (maïs) sans épargner les récoltes d’été (blé, orge…), le tassement occasionné pénalisera l’enracinement de la culture suivante.

Pour compenser l’augmentation du gabarit des machines (gage de productivité et de compétitivité) et par voie de conséquence, de leur poids, les constructeurs proposent des trains de chenilles en caoutchouc, en lieu des place des roues. L’effet anti-tassement s’explique par l’accroissement de la surface de contact au sol, diminuant d’autant la pression exercée sur chaque cm2.

Les chenilles en caoutchouc sont aptes à emprunter les voies de circulation. Moins sensibles au patinage que des roues, elles peuvent induire des économies de carburant.

Les engins agricoles mettent en oeuvre plusieurs types d’huiles : des huiles pour lubrifier le moteur, des huiles pour lubrifier les transmissions (boite de vitesse) et enfin des huiles animer des circuits hydrauliques. Sous une forte pression, l’huile hydraulique permet de mettre en mouvement certains organes des machines : lever / descendre la barre de coupe de la moissonneuse-batteuse par exemple.

La rupture d’un flexible hydraulique peut provoquer des fuites importantes dans le milieu naturel. Pour limiter l’impact environnemental de tels accidents, des huiles hydrauliques végétales ou biodégradables sont désormais
proposées aux agriculteurs.