© © Nicole Cornec
Céréales et défi alimentaire
La croissance démographique mondiale s’accompagnera de nouveaux besoins alimentaires. L’augmentation de la population mondiale va générer une croissance de 50 % de nos besoins en céréales d’ici 2030, qui passeront de 2 à 3 milliards de tonnes.
Avec l’augmentation du niveau de vie dans les pays en développement, la consommation évolue, en particulier vers d’avantage de produits carnés. Cette augmentation de la consommation de viande nécessitera une production plus
importante de céréales. En effet, il faut produire 3 calories de céréale pour obtenir 1 calorie de volaille.
Cette évolution du besoin en céréales est à mettre en perspective avec la situation actuelle qui met déjà en évidence de graves déséquilibres dans l’accès à la nourriture.
Aujourd’hui, plus d’un milliard d’adultes dans le monde souffrent de surpoids et 300 millions sont considérés comme obèses. Dans le même temps, 1,02 milliards d’êtres humains sont sous-alimentés dans le monde.
Source : OMS, FAO
Des marges de progression de la production existent encore à l’avenir en France et en Europe
Au niveau planétaire, on observe une diminution relative des surfaces agricoles disponibles, liée notamment à l’augmentation de la population et de l’urbanisation, à la désertification… Les rendements agricoles, quant à eux,
varient selon les zones géographiques, du fait des facteurs naturels - climat et disponibilité en eau principalement - et techniques.
A l’avenir, les experts s’accordent sur une croissance annuelle en France de l’ordre de 1 %.
Malgré une baisse des surfaces cultivées - 30 000 ha/an - et une réduction de la croissance des rendements, une poursuite de la croissance de la production en France et en Europe - de l’ordre de 1 % - est envisageable, pour répondre et contribuer au premier défi alimentaire, celui de la quantité disponible.
Des rendements de blé multipliés par 4 entre 1950 et 2000.
La surface nécessaire pour produire 100 tonnes de blé est passée de 55 à 14 hectares entre 1950 et 2000.
Source: USDA
Au niveau mondial, il existe de très importantes possibilités de croissance de la production dans certaines zones (Asie, Amérique du Sud) et la plupart des scénarii proposent pour l’avenir des réponses régionales, en lien avec l’évolution de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC).
Selon la FAO, les surfaces disponibles pour l’agriculture dans le monde représentent 4 milliards d’hectares dont seulement 1,5 milliard sont cultivés aujourd’hui.
Après la seconde guerre mondiale, la reconstruction de l’agriculture européenne a été accompagnée par la Politique Agricole Commune. Cette politique a permis aux agriculteurs européens d’investir et d’augmenter ainsi leur capacité de production. Notre pays est ainsi passé d’un état de dépendance extérieure à une situation d’autosuffi sance et d’exportation : la France est aujourd’hui le 1er producteur de l’Union Européenne à 27, dont elle totalise 20 % de la production agricole (contre 12,5 % de la population), et le solde positif de notre balance commerciale agricole et agroalimentaire s’élève à 8,8 milliards d’euros en 2008.
Source : Commerce Extérieur
Au cours du XXe siècle, la France a déjà connu une croissance très soutenue de sa population, puisque celle-ci a augmenté de 50 % entre 1950 et 2000.
Source : Insee
Grâce aux capacités d’adaptation de l’agriculture, à sa modernisation grâce à la PAC et aux excellentes conditions pédoclimatiques du pays, les rendements en France ont pu être multipliés, selon les espèces, par 3 ou 4 au cours de cette période.
Parallèlement, la part de l’alimentation dans le budget des ménages a été divisée par 2 entre 1960 et 2000.
Ainsi, se nourrir en Europe a coûté de moins en moins cher : la part du budget des ménages français consacré à l’alimentation a été divisée par deux entre 1959 et 2009 pour atteindre aujourd’hui moins de 15 % de leur budget total. Cette baisse relative des dépenses alimentaires a libéré du pouvoir d’achat qui a irrigué les autres branches de l’économie (loisirs, communications, transport). Elle a contribué au développement du secteur de la santé, et plus généralement des services, amenant les Européens à un meilleur niveau de vie.
Source : Insee
L’agriculture biologique a toute sa place
Les céréales françaises répondent aux attentes des consommateurs de produits issus de l’agriculture biologique. A titre d’exemple, l’agriculture biologique de céréales compte environ 5 000 exploitations soit près de 44 % du total des exploitations biologiques. Elle se place au 2nd rang de l’agriculture biologique, juste après les fruits et légumes. Avec plus de 95 000 hectares de surfaces cultivées, elle représente 2 % des surfaces céréalières nationales. Le blé tendre, le maïs grain et l’orge arrivent en tête de la production céréalière biologique.
Source : Agence Bio
L’espérance de vie en France est passée de 45 ans en 1900 à 81 ans en 2006. Aujourd’hui, les Français gagnent en moyenne 3 mois d’espérance de vie chaque année, notamment grâce à l’amélioration de la qualité de notre alimentation et à celle des productions agricoles.
Sur le plan de la qualité sanitaire, les intoxications alimentaires ont fortement diminué. Ainsi, dès les années 1960, la sélection d’espèces particulières et le choix de pratiques culturales adaptées ont par exemple permis d’éradiquer
complètement l’ergot des céréales. Autre exemple, depuis 1950, on observe une division par 4 de la fréquence du cancer de l’estomac, notamment du fait de l’amélioration de la qualité de l’alimentation, l’estomac étant le premier viscère exposé aux pollutions d’origine alimentaire.
Source : Centre International de Recherche sur le Cancer
De même, la qualité technologique des blés a été améliorée : la teneur en protéines du blé a augmenté d’un tiers en un siècle (elle est passée de 8 % au début du XXe siècle à 11 % à l’heure actuelle) tandis que sa valeur boulangère
(c’est-à-dire son aptitude à la panifi cation) a été multipliée par 3.
Source : ARVALIS-Institut du Végétal
Une chaîne de contrôles toujours plus rigoureuse
Pour assurer une qualité optimale de leurs productions, les agriculteurs et producteurs de Grandes Cultures français suivent une réglementation et une chaîne de contrôles particulièrement strictes en Europe, puisque les valeurs cibles retenues sont inférieures à celles du Codex Alimentarius (réglementation internationale FAO/OMS).
Ainsi, les Teneurs Maximales en Résidus (TMR) des produits alimentaires sont 100 à 1 000 fois inférieures aux Doses Sans Effet (DSE), et l’on dénombre 40 000 contrôles de conformité sanitaire organisés chaque année sur les lieux de vente des pays membres de l’Union Européenne.
De nouveaux enjeux en Recherche & Développement
Sur différentes thématiques telles que l’exposition aux allergènes ou la lutte contre l’obésité, la recherche agricole, via la génétique, travaille et élabore des espèces et des produits innovants, continuant de renforcer la qualité nutritionnelle et technologique de ses productions. L’Inra a par exemple conduit des projets pour élaborer un nouveau produit à base de blé vert enrichi en potassium, magnésium, vitamines A et B.
Grâce à la transgénèse, des produits comme le riz enrichi en béta-carotène, peuvent augmenter la valeur nutritive de notre alimentation. Le développement d’une agriculture de précision (par exemple par satellite) va également dans le sens d’une qualité sanitaire encore renforcée grâce à un dosage au plus juste des traitements des plantes contre les maladies et les ravageurs. Aujourd’hui les variétés sont sélectionnées selon des critères agronomiques (rendement, résistance aux maladies…) pour l’agriculteur et selon des critères technologiques et sanitaires pour les industries de transformation. Les techniques de production ont fait beaucoup de progrès : un champ de blé reçoit 10 fois moins de produits phytosanitaires qu’il y a 20 ans. La consommation d’engrais pour un hectare de blé a baissé de 33 % entre 1990 et 2006 en France et les volumes de pesticides vendus ont baissé de 21 % entre 2001 et 2008 en France.
Sources : UNIFA, UIPP
La recherche travaille actuellement pour augmenter encore la qualité nutritionnelle des céréales. De nouveaux procédés de transformation permettent de préserver voire d’améliorer les qualités nutritionnelles des grains. La littérature scientifique et les études récentes montrent qu’un certain nombre de composés bénéfi ques, contenus notamment dans les enveloppes externes des grains de céréales, protégerait des maladies cardiovasculaires,
du cholestérol et du diabète de type II.
Répondre aux enjeux de santé publique
La prévention de l’obésité et du diabète fi gure au coeur des politiques de santé publique en Europe. Une des stratégies pour lutter contre ces maladies est de prévenir leur apparition, en améliorant le potentiel nutritionnel des aliments.
Sachant que les céréales et les aliments céréaliers constituent le socle du régime alimentaire quotidien des Européens, il apparaît nécessaire de poursuivre l’amélioration des connaissances de leurs potentiels nutritionnels. Aujourd’hui, la recherche d’un meilleur équilibre alimentaire est une des voies principales pour améliorer la santé des Français.
La mise en oeuvre des recommandations alimentaires du Fonds Mondial de Recherche sur le Cancer (45 à 60 % de l’apport énergétique sous forme de glucides et protéines végétales, augmentation de la consommation de fi bres, augmentation de la consommation d’huiles végétales par rapport aux autres sources de lipides) pourrait à elle seule diminuer de 20 % l’incidence globale du cancer.
Un des objectifs clés du Programme National Nutrition et Santé est d’augmenter la consommation de glucides complexes (i.e. « les sucres lents ») et de fibres, et donc d’accroître la consommation de produit à base de céréales. Les céréales renferment de nombreux composés d’intérêt nutritionnel, notamment dans les enveloppes externes du grain : des minéraux, des oligo-éléments (magnésium, fer, potassium), des vitamines du groupe B (B1, B2, B5, B6, PP), en acide folique (B9), en vitamine E (aux propriétés anti-oxydantes) et des fibres solubles et insolubles.
Le développement de toutes les agricultures du monde reste ainsi un instrument fondamental du développement durable.
C’est avant tout une question d’équité et d’éthique, car c’est la meilleure façon de lutter contre la pauvreté et la faim dans le monde, qui ne sont pas liées à un déficit de la production agricole globale mais à son insuffisance dans certains pays. La levée de ces blocages et le développement agricole des pays en développement sont nécessaires à la sécurité alimentaire mondiale et à la régulation des marchés.
Le rapport de la Banque Mondiale de 2008 regrettait la faiblesse des investissements publics consacrés à l’agriculture (4 % de l’aide publique contre 12 % en 1990) et démontrait pourtant que la croissance du PIB due à l’agriculture contribue au moins deux fois plus à réduire la pauvreté que la croissance du PIB due au secteur non agricole.
Mais au-delà de l’intensité de l’aide, il s’agit aussi de s’interroger sur la qualité de ces subventions pour accompagner effectivement des processus de développement agricole sur le long terme. Alors que l’Europe cherche à revoir sa politique agricole pour l’après 2013, il est peut-être plus que jamais d’actualité d’explorer la possibilité de doter la future PAC d’un programme innovant de coopération pour le développement de l’agriculture.
Il s’agit aujourd’hui de redonner sa cohérence au projet de coopération agricole internationale, autour d’un appui concerté, stratégique, continu, aux efforts des pays en développement les plus démunis pour renouer avec le développement et la croissance et lutter contre la marginalisation, comme aux politiques engagées par les plus dynamiques pour s’intégrer à l’économie mondiale.
Les producteurs de céréales sont et resteront solidaires des agriculteurs dans tous les territoires du monde, en leur transférant leurs savoir-faire et leurs compétences.
Maintenir un potentiel d’exportations pour les régions qui ne peuvent subvenir à leur besoin
Les producteurs ont la volonté d’éviter de nouvelles émeutes de la faim, sous réserve de maintenir des capacités de production pour pouvoir répondre à la demande via une politique agricole européenne.
En produisant régulièrement en quantité et en qualité pour exporter ensuite sur les régions déficitaires, notamment le Maghreb, la production agricole européenne de céréales participe au maintien de la stabilité politique
et sociale de l’Europe et de ses pays voisins.